5 November 2025 Recherche

Psychiatrie sociale, le futur de la psychiatrie ?

En Suisse, la psychiatrie sociale s’est développée grâce à des figures comme Forel, Bleuler, Jung, Meyer ou Ciompi, mais son application reste inégale à cause d’un financement inadapté et de l’absence d’une politique nationale unifiée. Malgré la domination actuelle des neurosciences, les avancées les plus concrètes pour les personnes atteintes de troubles psychiques viennent des pratiques de la psychiatrie sociale.

Un nouvel article sur la psychiatrie sociale et son futur par Bonsack C, Richter D, Golay P, Rexhaj S, Warnke I, Stulz N, Suter C, Kaech F, Burr C & Favrod J. Social Psychiatry: The Future of Psychiatry? World Social Psychiatry. 2025;7(2):141-8.

L’article raconte l’évolution et l’importance de la psychiatrie sociale, une branche de la psychiatrie qui s’intéresse aux liens entre la société et la santé mentale. Née avant la Seconde Guerre mondiale, cette approche a d’abord été influencée par le mouvement de l’hygiène mentale, puis par les critiques de l’antipsychiatrie. Elle a contribué à faire sortir les malades des asiles pour leur permettre de vivre dans la communauté, soutenus par des services de proximité.

La psychiatrie sociale repose sur l’idée que les troubles mentaux ne peuvent être compris ni soignés uniquement par la biologie ou la psychologie. Les conditions sociales, économiques et culturelles jouent un rôle déterminant. Cette discipline promeut donc des soins ancrés dans le tissu social, visant la réinsertion, la réduction de la stigmatisation et la promotion du rétablissement personnel. Le rétablissement ne signifie pas seulement la disparition des symptômes, mais la possibilité de mener une vie pleine de sens, d’espoir et de relations.

L’article retrace plusieurs cycles historiques de réforme, depuis l’époque des asiles jusqu’au modèle actuel centré sur l’inclusion sociale et la participation citoyenne. En Suisse, la psychiatrie sociale s’est développée grâce à des figures comme Forel, Bleuler, Jung, Meyer ou Ciompi, mais son application reste inégale à cause d’un financement inadapté et de l’absence d’une politique nationale unifiée.

Les auteurs décrivent ensuite les défis contemporains : les transformations rapides du monde (numérisation, migration, précarité, changement climatique) fragilisent les liens sociaux et augmentent les troubles mentaux. Face à cela, la psychiatrie sociale a un rôle essentiel à jouer à trois niveaux. Au niveau des politiques de santé, elle doit influencer les décisions pour réduire les inégalités et promouvoir les droits humains. Au niveau des services, elle encourage des soins communautaires diversifiés, respectueux du choix des personnes et reposant sur la collaboration avec les pairs et les proches. Enfin, au niveau individuel, elle met l’accent sur le rétablissement, la reconnaissance des différences et l’autonomie des personnes.

En conclusion, les auteurs affirment que malgré la domination actuelle des neurosciences, les avancées les plus concrètes pour les personnes atteintes de troubles psychiques viennent des pratiques de la psychiatrie sociale. Pour eux, cette approche n’appartient pas au passé mais incarne l’avenir de la psychiatrie, capable de répondre aux besoins réels des individus et des sociétés modernes.